Chapitre 7 Les applications des méthodes de recherche à la surveillance en santé publique et à l’évaluation de programmes

Après avoir achevé ce chapitre, le lecteur sera en mesure :

1. De comprendre l’importance de la surveillance des maladies pour préserver la santé des populations et connaître les méthodes de surveillance  (Conseil médical 78-3)
− de distinguer la surveillance passive de la surveillance active

2. Citer les sources possibles de données pour la surveillance :
− les registres des hôpitaux
− les statistiques démographiques
− le Recensement
− les enquêtes sur la santé
− la surveillance sentinelle

3. D’ aborder la question des systèmes de surveillance et du rôle des médecins et de la santé publique dans la déclaration et le traitement de maladies (78-2) 

4. D’adopter une définition d’une épidémie comme étant un certain nombre de cas dépassant les prévisions habituelles (78-5)

5. Être en mesure de distinguer les profils de développement des maladies dans une population décrits par les courbes épidémiques :
éclosion d’origine ponctuelle
source persistante
exposition intermittente
cas index à transmission limitée
transmission disséminée

6. Indiquer les types de données et les composantes communes (tant qualitatives que quantitatives) utilisées pour évaluer les besoins de santé d’une collectivité  (78-2)

7. Posséder une certaine connaissance des évaluations économiques comme les analyses de rentabilité ainsi que des problèmes liés à la répartition des ressources (78-4) :
− décrire les principes et les méthodes de l’évaluation des programmes 

Ces connaissances s’adressent aux objectifs d’examen du Conseil médical du Canada, notamment les chapitres 78-2, 78-3 et 78-4.

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Les mots en MAJUSCULES sont définis dans le Glossaire.

Rédaction d’un sommaire de congé de l’hôpital

La Dre Li, une interniste médicale à l’hôpital de Weenigo, prépare le formulaire de sortie de Catherine Richard. On a transféré Mme Richard de son foyer de soins de longue durée à l’hôpital en raison d’une toux qui s’aggravait, accompagnée de signes de bronchopneumonie et d’une légère insuffisance cardiaque liée à la pneumonie. L’investigation initiale a révélé que le diabète de Mme Richard était loin d’être maîtrisé et il y avait croissance de pneumocoques dans ses cultures sanguines. Mme Richard a bien réagi au traitement et a pu retourner à son foyer de soins une semaine après son entrée à l’hôpital.

La Dre Li est fatiguée; elle se demande ce qu’elle doit inscrire dans l’espace réservé au diagnostic principal, et l’importance qui sera réellement accordée à ce qu’elle finit par écrire – quelqu’un fait-il quelque chose avec ces informations? Elle se demande si elle devrait faire référence à l’accident vasculaire cérébral de Mme Richard qui, en l’immobilisant a probablement contribué au développement de sa bronchopneumonie. Elle aimerait pouvoir inscrire « syndrome métabolique » parmi les causes sous-jacentes de l’hospitalisation, mais la dernière fois qu’elle a utilisé cette expression dans un rapport de sortie, l’archiviste lui a dit qu’aucun code n’y était lié. Elle se demande aussi si elle doit déclarer l’infection invasive à pneumocoque au service de santé publique.

La surveillance

Pour être fondée sur les preuves, la planification de tout service de santé ou programme préventif exige la collecte initiale de renseignements sur les types et la répartition des problèmes de santé dans la population. C’est là le rôle de la surveillance, à savoir la collecte et l’analyse continues et systématiques d’information sur la santé d’une population afin de guider l’élaboration d’interventions de santé publique et de prévention.

Surveillance

La surveillance est la collecte systématique et l’analyse de renseignements sur la santé des populations et la diffusion opportune de ces renseignements aux personnes concernées pour qu’elles puissent intervenir. Grâce à la surveillance, on connaît mieux les profils de la santé et de la maladie et leur évolution. Ces renseignements peuvent guider les efforts de prévention et de contrôle, ainsi que contribuer à la planification des services de santé et, ultérieurement, à l’évaluation de leur impact. Comme la santé peut être influencée par des facteurs divers, communautaires et environnementaux, les données de surveillance de la santé peuvent provenir de diverses sources :

  • les statistiques démographiques, comme les naissances et les décès;
  • les données environnementales sur la qualité de l’air et de l’eau;
  • les indicateurs des services de santé, comme les sorties des hôpitaux, tandis que
  • le Recensement fournit de l’information sur la population, comme le revenu, la langue et le groupe ethnique.

La surveillance représente une bonne partie du travail des autorités régionales et provinciales de santé publique et de l’Agence de la santé publique du Canada.

Le rôle des cliniciens dans la surveillance de la santé publique

De manière générale, c’est aux services de santé publique de coordonner la surveillance de la santé, mais chaque clinicien joue un rôle primordial en signalant l’apparition de certaines maladies contagieuses chez ses patients. Les médecins de premier recours sont habituellement les premiers à voir les cas qui pourraient se transformer en épidémie. Ils constateront par exemple une augmentation d’une affection particulière, et il se peut que leurs patients mentionnent d’autres personnes présentant les mêmes symptômes. Le médecin peut être en mesure d’entamer une enquête préliminaire, mais doit également communiquer avec le service de santé publique pour amorcer des mesures de prévention et de contrôle (p. ex., le retraçage des contacts), au besoin. Les autorités de santé publique réunissent les données sur les cas déclarés pour dresser un portrait de l’étendue et de la gravité d’une menace pour la santé. En plus de se conformer à la déclaration obligatoire des maladies, les médecins contribuent aux systèmes de surveillance en remplissant les certificats de décès et en veillant à l’exactitude des diagnostics dans les rapports de sortie d’hôpital et les factures médicales.

Les types de surveillance et leurs sources d’informations

Il existe deux principaux types de surveillance. La surveillance passive à long terme surveille les tendances générales de l’état de santé et des déterminants de la santé. Cela a permis de documenter l’épidémie actuelle d’obésité et les changements dans les tendances de certains cancers, par exemple. La surveillance active ou à court terme recherche les maladies émergentes ou les éclosions comme le SRAS ou la COVID-19, et aide la société à réagir rapidement aux nouvelles menaces.

La surveillance passive

Le terme « passive » dans l’expression « surveillance passive » désigne la nature du rôle de l’agence responsable. Cette dernière ne fait que recevoir les déclarations : les données recueillies systématiquement, comme les registres des sorties des hôpitaux, les données relatives à la mortalité ou les factures médicales, et les données sur les maladies à déclaration obligatoire.

Une MALADIE À DÉCLARATION OBLIGATOIRE est une maladie d’importance pour la santé publique. La loi exige que les médecins et les laboratoires déclarent ces maladies aux services locaux de santé publique lorsqu’elles sont soupçonnées ou diagnostiquées. Cela permet de suivre la fréquence de ces maladies et de détecter rapidement les éclosions pour pouvoir mettre en œuvre des mesures de prévention et de contrôle en temps opportun. Cependant, comme les professionnels de la santé ne se rendent pas toujours compte de l’importance des renseignements qu’ils fournissent, la sous-déclaration peut s’avérer problématique. En outre, certaines provinces ont des lois qui exigent la déclaration de toutes les éclosions éventuelles, même pour les maladies qui ne sont pas à déclaration obligatoire. Par exemple, selon la Loi sur la santé publique du Québec, « un médecin qui soupçonne une menace à la santé de la population doit en aviser le directeur de santé publique du territoire. » On trouvera à la chapitre 11 de plus amples renseignements sur la prise en charge d’une épidémie. 

Les maladies à déclaration obligatoire

Le concept de maladie à déclaration obligatoire s’applique surtout aux maladies transmissibles qui présentent une menace d’épidémie, mais il peut aussi s’appliquer à certains états non transmissibles. Au Québec, les empoisonnements par certains agents, comme les métaux lourds ou le monoxyde de carbone, doivent être déclarés. Il en va de même pour certaines maladies causées par des agents environnementaux non transmissibles.

La désignation d’une maladie comme étant à déclaration obligatoire dépend de la menace qu’elle représente pour la communauté. De nouvelles maladies infectieuses peuvent s’ajouter à la liste au fur et à mesure qu’elles apparaissent, surtout si elles sont souvent transmises par les voyageurs internationaux. De nombreuses infections contagieuses doivent être déclarées à l’OMS, comme la peste, le choléra, la fièvre jaune et d’autres maladies énumérées dans le Règlement sanitaire international. L’OMS surveille également les tendances mondiales relatives à la poliomyélite, au paludisme, au SRAS et à la grippe de type A. Le Réseau mondial d’alerte et d’action en cas d’épidémie de l’OMS est un dispositif de collaboration entre experts qui permet de riposter rapidement aux éclosions d’importance internationale. La loi fédérale canadienne ne comprend qu’un cadre pour la déclaration obligatoire des maladies, bien que l’Agence de la santé publique exige que certaines maladies soient déclarées à l’échelle nationale. Leur déclaration est régie par les lois provinciales, et la liste des maladies varie d’une province à l’autre. Vous pouvez aussi consulter les Maladies à déclaration obligatoire en direct pour connaître les maladies devant être déclarées, ainsi que leur fréquence.

Les registres des hôpitaux et les factures médicales

Les registres des sorties des hôpitaux peuvent fournir des renseignements utiles sur les profils de maladies et les traitements connexes, mais la disponibilité des services influence grandement l’utilisation que l’on en fait. Par conséquent, il n’est pas très utile de comparer ces données d’un endroit à l’autre ou au fil du temps aux fins de surveillance des maladies. De même, on peut consulter les factures médicales, mais les nouvelles méthodes de rémunération des médecins et les diagnostics inexacts ou manquants limitent la pertinence de cette source de données pour la surveillance.

Les statistiques démographiques : naissances et décès

L’enregistrement des naissances et des décès est obligatoire dans la plupart des pays et fournit des statistiques démographiques de base. On a souvent recours aux registres des décès pour fournir des renseignements nationaux sur les tendances des maladies comme le cancer. Les médecins sont responsables d’inscrire les causes de décès sur les avis de décès. Ces causes sont codées conformément à la Classification internationale des maladies (CIM) afin que les pays puissent comparer les taux de décès et rendre compte de l’évolution des maladies. Encore une fois, l’exactitude de ces renseignements dépend de l’exactitude avec laquelle le médecin responsable de la déclaration a consigné la cause du décès, étant donné qu’elle est rarement confirmée par autopsie.

Le codage de la CIM commence par l’enregistrement de la « maladie ou affection entraînant directement le décès » sur la première ligne d’un certificat de décès. On note ensuite la ou des affections ou de la chaîne d’événements qui ont précipité cette affection, la cause sous-jacente du décès étant indiquée en dernier. La cause sous-jacente est « la maladie, le traumatisme ou l’état pathologique qui a initié la chaîne d’événements morbides conduisant directement au décès. »1 Ou, dans le cas d’une blessure, « les circonstances de l’accident ou de la violence qui ont produit la blessure mortelle. »

Histoire de la CIM

La Classification internationale des maladies a vu le jour en 1891 quand la Société internationale d’épidémiologie a entamé une classification des causes de décès. Déjà en 1900, 26 pays avaient adopté cette classification. Depuis, la plupart des pays l’ont adoptée, et la classification a été révisée en fonction du développement des sciences médicales. Depuis 1946, l’OMS se charge de la coordination des révisions à la liste. La dixième révision est parue en 1994, et le Canada l’a adoptée aux fins de codage des causes de décès en 2001. La 11é édition a vu le jour en 2022, et est en train d’être adopté par de divers pays.

La surveillance active

La surveillance active est une forme de surveillance où les responsables jouent un rôle plus actif dans la collecte de données. Comme ce type de surveillance exige davantage de ressources, il est habituellement réalisé à une fin précise. Par exemple, la Société canadienne de pédiatrie envoie périodiquement des lettres aux pédiatres leur demandant de signaler les cas d’affections rares. Les cas de paralysie flasque aiguë, par exemple, permettent d’évaluer l’efficacité de la vaccination antipoliomyélitique, et les cas d’œdème cérébral en présence d’acidocétose diabétique ont permis de caractériser l’affection et d’élaborer des directives pour sa prise en charge. La Société signale ensuite ces données à l’Agence de la santé publique du Canada.

Les enquêtes sur la santé

Les enquêtes, comme l’Enquête sur la santé dans les collectivités canadiennes (ESCC) et le Recensement national, peuvent aussi être considérées comme de la surveillance active. L’ESCC a vu le jour en 2001. Tous les deux ans, elle recueille des données sur l’état général de santé et les habitudes de santé d’un échantillon aléatoire de la population. Les autres années, elle recueille des données sur des sujets précis liés à la santé auprès d’un échantillon plus petit. Les enquêtes peuvent aussi cibler des groupes particuliers, comme les utilisateurs de drogues par injection ou les personnes ayant reçu tel ou tel diagnostic, pour répertorier les changements dans les profils de comportement qui pourraient avoir un impact sur les maladies ou leur transmission. C’est ce qu’on appelle la surveillance de deuxième génération. À l’OMS, par exemple, on enregistre périodiquement les renseignements sur les comportements à risque en lien avec le VIH, et l’on s’en sert pour expliquer les changements dans les taux d’infection et pour en aviser les autorités.

Le Recensement

Les renseignements sur les dénominateurs de la population nécessaires à l’interprétation de la plupart des données de surveillance proviennent du Recensement. Le premier Recensement national canadien décennal a été réalisé en 1871. Il y a depuis un Recensement tous les dix ans, lors des années se terminant en « 1 ». Depuis 1956, un Recensement supplémentaire est réalisé lors des années se terminant en « 6 ». Les deux Recensements tiennent compte de l’ensemble de la population et recueillent des données démographiques de base (environ huit questions). En outre, on recueille auprès d’un échantillon aléatoire représentant 20 % de la population des renseignements plus détaillés portant sur des sujets démographiques, sociaux et économiques, mais non sur la santé (environ 50 questions).

La surveillance sentinelle

La notion de sentinelle fait référence aux cliniciens qui surveillent des maladies d’intérêt particulier. Des cliniciens choisis recueillent des données et les transmettent aux responsables de la surveillance. Par exemple, le Réseau canadien de surveillance sentinelle en soins primaires relie des équipes de santé familiale au moyen d’un système de surveillance des dossiers électroniques. Ce système peut servir à signaler des événements rares (comme les effets secondaires des vaccins contre le COVID-19) et contribue à améliorer la qualité des soins. Si l’échantillon de médecins est bien choisi, on peut faire des estimations de l’incidence de l’événement d’intérêt dans la population sans avoir à sonder toute la population.

La surveillance de la grippe

Le système national de surveillance de la grippe au Canada, appelé « Surveillance de l’influenza », offre aux professionnels de la santé et au grand public un portrait pancanadien de l’activité grippale tout au long de l’année. Le système fournit aux professionnels et au public des informations rapides sur les éclosions de grippe à travers le pays; identifie les nouveaux sous-types du virus et leur sensibilité aux antiviraux; et fournit des renseignements de surveillance virologique dont l’OMS se sert pour formuler des recommandations sur le meilleur vaccin à utiliser durant la saison grippale suivante.

Les renseignements proviennent des rapports sur le virus recueillis par les laboratoires du réseau sentinelle du pays; des reportages du Laboratoire national de microbiologie, et des consultations de soins primaires portant sur le syndrome grippal d’après les praticiens du réseau sentinelle du pays.

Vous trouverez de plus amples renseignements sur le site Web de l’Agence de la santé publique du Canada.

Analyser les rapports de surveillance

Si, selon la surveillance, il y a des changements au profil d’une maladie, il faut se poser les questions suivantes :

  1. S’agit-il d’un véritable changement?
    Si une maladie est rare, les fluctuations fortuites peuvent causer de grandes variations proportionnelles. Ainsi, une augmentation rapide apparente aurait-elle pu se produire parce que le nombre initial de cas était faible? Le regroupement de données provenant de lieux ou d’intervalles de temps différents peut parfois rectifier ce problème; cependant, certains regroupements peuvent mener à différentes interprétations des données.
  2. Est-il possible que le changement découle d’une modification des pratiques de déclaration? La précision des données varie-t-elle?
    Les pratiques de déclaration ont-elles changées? Les programmes de dépistage peuvent augmenter la prévalence apparente d’une maladie, car ils reconnaissent des cas qui n’étaient pas diagnostiqués antérieurement. Par exemple, la récente augmentation de cas de chlamydia déclarés peut être partiellement due au dépistage systématique, surtout depuis l’introduction de l’analyse urinaire non invasive.
  3. A-t-on modifié la définition de la maladie, ce qui a pu causer le changement?
    A-t-on recours aux mêmes critères diagnostiques? Par exemple, les changements aux critères diagnostiques de l’autisme ont mené, à tort, à des rapports sur l’incidence croissante de ce trouble.

Les profils de développement des maladies dans une population : la courbe épidémique

Une épidémie est l’incidence d’une maladie bien au-delà des attentes normales. Le nombre de nouveaux cas qui doivent être signalés avant de déclarer une épidémie varie en fonction de la maladie, du moment et du lieu. Lorsque nos efforts de prévention d’une maladie échouent et qu’une épidémie se développe, la répartition des cas qui en résulte au fil du temps peut prendre diverses formes appelées courbes épidémiques. Elles tracent ainsi l’évolution de l’éclosion, ce qui correspond pour une population à l’histoire naturelle de la maladie pour un cas individuel. L’histoire naturelle d’une éclosion dans une population est la plus évidente lorsqu’il s’agit d’une maladie infectieuse, mais on peut également la suivre dans des situations comme un déversement de produits chimiques menant à des cas de maladie respiratoire ou, sur un intervalle beaucoup plus long, à des cas de maladies chroniques non transmissibles. On peut se baser sur la forme de la courbe épidémique pour avancer des hypothèses sur la nature de la maladie et son mode de transmission. En plus de montrer le profil temporel, la courbe montre l’ampleur de l’éclosion (le nombre de cas), la période d’incubation probable de l’affection et peut révéler des valeurs aberrantes (par rapport au temps et parfois au lieu).

Afin de caractériser les différents types d’éclosions, les Centers for Disease Control classent les courbes épidémiques en fonction du type d’exposition présumé.2 En présence d’une éclosion de source commune, les personnes sont exposées à une même influence nocive. Selon les circonstances, la source peut être présente pendant un court laps de temps ou sur une période prolongée. Lorsque l’exposition est très brève, la plupart des personnes deviennent malades après une seule période d’incubation suivant l’exposition. Il s’agit alors d’une éclosion d’origine ponctuelle. Une intoxication alimentaire par la bactérie Staphylococcus aureus lors d’un repas de mariage (quelle gêne!) en est un exemple. Elle produit une courbe unique qui décline rapidement, pourvu qu’il n’y ait pas de transmission de personne à personne (figure 7.1).

Figure 7.1 : Courbe épidémique d'une éclosion d'origine ponctuelle
Figure 7.1 : Courbe épidémique d’une éclosion d’origine ponctuelle

La distribution temporelle des cas reflète la période d’incubation différentielle pour chaque personne. Il se peut que certaines personnes aient consommé davantage de l’aliment infecté et qu’elles soient tombées malades plus tôt que les autres, ou qu’elles aient été plus susceptibles à la source d’infection. Autrement, certaines auraient pu prendre plus de temps à consulter et, ainsi, à faire partie de la collecte de données.

Source persistante : Il arrive que l’exposition à une source commune se prolonge, comme l’exposition à l’eau d’un réseau contaminé, ou aux aliments dans un restaurant dont le système de réfrigération fait défaut et n’est pas réparé. Les cas surviennent alors au cours d’une période prolongée, mais toujours d’une source commune ou unique. La courbe épidémique qui en résulte est plus longue et étendue, indiquant la durée prolongée de la contamination et les variations individuelles des périodes d’incubation (voir la figure 7.2). La courbe se termine lorsque la source de contamination est corrigée ou lorsque toutes les personnes susceptibles deviennent immunisées. L’aspect relativement plat de la courbe suggère que l’infection provient d’une source commune et qu’il n’y a pas de transmission de personne à personne; sinon, le nombre de cas augmenterait au fur et à mesure que le temps avance et qu’une personne en infecte d’autres.

Figure 7.2 : Courbe épidémique d'une source persistante
Figure 7.2 : Courbe épidémique d’une source persistante

Exposition intermittente : La figure 7.3 montre un profil irrégulier de cas qui reflète la date d’apparition et la durée d’expositions répétées. A priori, il est difficile de déterminer si la source est commune (par exemple un contaminant industriel émis à certains intervalles) ou si les sources sont variées (comme une série d’éclosions de toxi-infections alimentaires survenant dans différents camps d’été pour enfants). L’écart entre les éclosions pourrait suggérer une transmission de personne à personne suivie d’une période d’incubation, mais les pics successifs n’augmentent pas de taille et ne fusionnent pas, comme ce serait le cas si les éclosions résultaient d’une propagation infectieuse où une personne en infecte plusieurs. Ainsi, la courbe épidémique de la figure 7.3 semble représenter une affection non transmissible.

Figure 7.3 : Courbe épidémique d'une éclosion intermittente
Figure 7.3 : Courbe épidémique d’une éclosion intermittente

Cas index à transmission limitée : La figure 7.4 illustre une transmission de personne à personne qui présente un profil typique survenant lorsqu’un seul cas, qu’on appelle le cas index (par exemple, un voyageur qui revient de l’étranger), infecte d’autres personnes après une période d’incubation. Il s’agit d’une origine ponctuelle à transmission secondaire. L’éclosion diminue lorsque les personnes infectées cessent de transmettre l’infection à d’autres personnes susceptibles, possiblement en raison de mesures de lutte efficaces (isolement ou quarantaine).

Figure 7.4. Transmission secondaire par un cas index unique
Figure 7.4. Transmission secondaire par un cas index unique

Transmission disséminée : Elle débute comme une infection découlant d’un cas index (figure 7.4), mais les cas secondaires de la maladie agissent ensuite comme des sources qui infectent de nouvelles personnes, lesquelles en infectent d’autres à leur tour. Comme on le voit à la figure 7.5, cela produit des pics de plus en plus hauts à chaque génération (c.-à-d., les cas secondaires et tertiaires). Les pics sont d’abord séparés par une période d’incubation. Par la suite, les pics ont tendance à se joindre et à former une seule vague et l’épidémie persiste jusqu’à ce que le nombre de personnes susceptibles diminue ou que les mesures d’intervention donnent des résultats. C’est le profil des maladies comme la rougeole, qui se transmettent d’une personne à l’autre.

Figure 7.5 : Cas index avec courbe épidémique de transmission disséminée
Figure 7.5 : Cas index avec courbe épidémique de transmission disséminée

Tracer une courbe épidémique, ainsi que la répartition géographique des cas, constitue une première étape importante pour caractériser une épidémie et juger de la probabilité de sa transition vers une épidémie complète – des sujets qui seront abordés au chapitre 11. À partir de décembre 2023, une courbe épidémique de la COVID-19 au Canada était disponible sur le site Web de Santé Canada.

Les informations sur le succès des réactions politiques face à l’évolution des pathologies proviennent de la recherche sur les services de santé.

La recherche sur les services de santé

L’augmentation des dépenses liées aux percées médicales et les demandes supplémentaires de soins qu’elles créent signifient que les systèmes publics ont de la difficulté à payer pour chaque nouveau traitement qui devient disponible. Pour ne pas dépasser leurs budgets, les gestionnaires et les professionnels de la santé doivent donc faire un tri parmi les programmes à financer. Leurs décisions se fondent sur la nécessité, les bienfaits et l’amélioration éventuelle des programmes. La recherche qui alimente ces décisions est la RECHERCHE SUR LES SERVICES DE SANTÉ, laquelle comprend l’appréciation des besoins, l’évaluation économique et l’évaluation globale des programmes.

L’appréciation des besoins

Les planificateurs des services de santé doivent savoir de combien de services de santé la population a besoin (voir BESOIN DE SOINS dans le glossaire) et de quels types de services. Une première approximation consiste à fonder une estimation des besoins sur les données actuelles d’utilisation et les profils historiques de soins, en tenant compte des tendances démographiques. L’avantage de cette méthode est que, d’ordinaire, ces données sont facilement accessibles et peuvent être comparées à celles d’autres administrations afin d’estimer le niveau approprié de prestation de services. Toutefois, les données sur l’utilisation reflètent généralement l’offre et la demande historiques de services (et ces deux éléments s’influencent mutuellement) beaucoup plus qu’ils ne reflètent la notion plus abstraite de besoin. 3, 4

Une autre approche distingue le besoin de la demande et introduit les idées de prévalence et d’efficacité des soins dans le calcul : elle soutient que nous n’avons pas besoin de soins inefficaces.5-7 Cette approche part de la prévalence d’une condition dans l’ensemble de la population, pas seulement chez ceux qui consultent. Il intègre ensuite des données probantes sur l’efficacité des interventions disponibles (préventives et curatives) pour estimer le nombre d’interventions requises. Ces estimations peuvent être comparées au niveau actuel de prestation de services afin d’identifier les procédures qui peuvent être sur- ou sous-approvisionnées. Un exemple d’évaluation des besoins en matière de services d’AVC est présenté dans l’encadré de l’illustration.

Définir le besoin

Le besoin de soins peut parfois être défini de manière absolue : une personne est blessée et doit recevoir des soins d’urgence pour survivre. La difficulté est de savoir quand s’arrêter; on pourrait penser que les patients mourants nécessitent des interventions héroïques, mais celles-ci peuvent prolonger l’affection sans la guérir. La crainte d’une intervention inappropriée a conduit à définir le besoin en termes relatifs, compte tenu des avantages qui découleraient de tout soin qui pourrait être fourni.

En se fondant sur l’approche relative, Acheson définit le besoin comme « l’aptitude d’une personne à profiter des soins. [Le besoin] existe lorsqu’une personne présente une affection contre laquelle il existe une intervention efficace et acceptable. »5 Selon cette conception, le patient pourrait demander des soins (par ex. un médicament antibiotique pour une infection virale) mais lorsque le traitement n’est pas efficace, le patient n’en a pas besoin. Cela peut sembler paradoxal, mais dans une perspective de soins de santé, il est raisonnable d’employer les ressources limitées à des activités offrant un avantage et de ne pas les gaspiller pour des traitements inefficaces.

Selon une synthèse plus récente des perspectives absolue et relative, la relation entre le besoin et la demande ne doit pas être conflictuelle. Le patient et le médecin doivent négocier les attentes en matière de soins. Les fournisseurs ne font qu’offrir des services pour lesquelles il existe de preuves d’efficacité et le patient et sa famille sont en partie responsables d’identifier les services à recevoir.

La distinction entre le besoin et la demande nous rappelle les facteurs qui jouent dans la définition de la maladie. Celle-ci est influencée d’une part par la demande (de traitements) et de l’autre, par l’offre (p. ex., la commercialisation des nouveaux produits pharmaceutiques, dont les ventes financent la recherche pour mettre au point des produits qui répondront à la demande future).

Combien de lits faut-il réserver aux victimes d’AVC?

Une étude des besoins de services destinés aux victimes d’accidents vasculaires cérébraux dans l’Est de l’Ontario sert comme illustration des étapes d’une étude des besoins :

  1. On a cerné les facteurs de risque de subir un AVC à l’aide d’une combinaison de stratégies de recherche systématiques et de consultations avec des experts-cliniciens.
  2. On a estimé la fréquence des AVC et de leurs facteurs de risque dans la région.
  3. On a identifié des services de santé efficaces ciblant chaque affection ou facteur de risque à partir des examens systématiques et des directives de pratique publiés.
  4. De là, on a déterminé le nombre et le type de services de santé requis.
  5. On a comparé ces estimations aux services réellement offerts.

Selon cette étude, il existe plusieurs disparités entre le besoin estimé et les services réellement offerts aux victimes d’AVC. Cette méthode est une façon efficace de prendre des décisions relatives à la planification des soins de santé.8

L’évaluation économique

Les ressources étant limitées, il faut choisir les services de santé à fournir ; l’économie de la santé utilise des renseignements sur les coûts et les résultats des soins pour guider ces choix. L’économie de la santé est un domaine de l’économie qui considère les coûts, les avantages, la répartition des ressources, l’utilisation, les intrants, les extrants et les résultats de soins de santé de toute sorte.1 Les coûts représentent la valeur des ressources utilisées pour la prestation d’un service. Ils comprennent les éléments comme le salaire du personnel, les édifices, l’équipement, l’entretien et les fournitures. Les coûts sont habituellement mesurés en valeur monétaire. Les résultats ou les avantages sont les conséquences d’un traitement ou d’une intervention et peuvent comprendre le soulagement de symptômes, les taux de survie ou l’amélioration de la qualité de vie, comme on l’a vu au chapitre 6. Dans le cadre d’évaluations économiques, les résultats sont souvent mesurés en fonction de la SAQV ou des AVCI (voir SURVIE AJUSTÉE POUR LA QUALITÉ DE VIE (SAVQ) ou ANNÉES DE VIE CORRIGÉES DE L’INCAPACITÉ (AVCI) dans le glossaire).

La perspective économique centrale est qu’un service de santé doit fournir le meilleur avantage possible par coût unitaire. Comme il existe plusieurs façons d’estimer les avantages ou les extrants, on trouve quatre grands types d’évaluation économique. Elles évaluent le coût des intrants de manière semblable, mais se distinguent par leur façon d’évaluer le coût des extrants.

  1. L’analyse de minimisation des coûts est l’analyse économique la plus simple. Elle s’applique quand deux interventions ont des avantages identiques, et qu’il est donc préférable de fournir l’intervention la moins coûteuse. Le choix entre un médicament de marque et un médicament générique en est un exemple.
  2. L’analyse coûts-avantages présente les avantages en valeur monétaire (en dollars). Par exemple, si une entreprise offre un programme de conditionnement physique à ses employés, ce programme représente un certain coût par participant, mais l’entreprise en retire un gain financier si le programme réduit les congés de maladie et augmente la productivité.
  3. L’analyse coûts-efficacité évalue les extrants en fonction de l’amélioration des résultats cliniques (maîtrise des symptômes, survie, etc.). Par exemple, une étude a comparé la méthode classique de fécondation in vitro à une nouvelle méthode. L’étude a tenu compte des coûts de chaque approche et a utilisé comme extrant le nombre de grossesses menant à des naissances vivantes.9
  4. L’analyse coûts-utilité est une forme d’analyse coûts-efficacité où l’on ajuste la mesure du résultat pour tenir compte de son utilité, au moyen de la SAQV, des AVCI (voir chapitre 6) ou de l’espérance de vie corrigée en fonction de la santé (EVCS). Un atout considérable de cette approche est qu’elle permet de comparer les interventions pour différentes maladies – p. ex. un programme d’abandon du tabac versus un programme d’échange de seringues. Notons que de nombreux articles publiés prétendent être des analyses coûts-efficacité alors que ce sont en réalité des analyses coûts-utilité.

L’évaluation des programmes

Un programme de santé est une série d’activités planifiées; le plan comprend l’objectif, le financement, les rôles et les responsabilités, et les résultats attendus du programme. Le programme national de dépistage du cancer du sein, les cliniques de réadaptation cardiaque et la campagne annuelle de vaccination contre le COVID-19 à la clinique du Dr Rao sont tous des exemples de programmes de santé.

Comme on tente généralement d’économiser, chaque programme comprend une évaluation afin de démontrer que l’on dépense les fonds public de manière responsable. L’évaluation de programme « englobe la collecte, l’analyse et la diffusion systématiques de données sur un programme dans le but de faciliter la prise de décision. » Une évaluation doit répondre à la question suivante : Le programme a-t-il atteint les buts et les objectifs énoncés? (Un but est un énoncé général de ce que le programme souhaite réaliser, tandis qu’un objectif est une cible plus précise qui mène à la réalisation du but global). Les méthodes de recherche quantitative et qualitative décrites dans le chapitre 5 s’appliquent à l’évaluation de programme, tout en utilisant les mesures de santé décrits dans le même chapitre.

On peut évaluer les programmes en fonction de leur structure, de leur processus et de leur résultat, comme l’a proposé Donabedian en 1966 : 10

  • Structure : le caractère adéquat des installations, de l’équipement, du personnel et/ou de l’administration du programme. (Le Dr Rao devrait-il embaucher une autre infirmière pour aider l’infirmière Jennings pendant la « soirée des vaccins »?)
  • Processus : ce que fait le programme. Par exemple, dans un hôpital, cela peut représenter le caractère adéquat de la prise d’anamnèse, de l’examen physique, du diagnostic, du traitement ou de la prévention tertiaire. En santé publique, le processus peut comprendre le nombre de tests de dépistage réalisés, le nombre de messages diffusés à la radio, etc. (Dans quelle mesure le Dr Rao a-t-il bien organisé sa clinique le soir de la vaccination? Y avait-il suffisamment de vaccins?)
  • Résultat : les résultats ou extrants du programme. Les attitudes et la satisfaction des patients, leur niveau de réadaptation ou d’incapacité résiduelle ou les taux de mortalité parmi eux. (Quelle proportion des patients du groupe cible a-t-on immunisée lors de la soirée des vaccins? Reviendront-ils l’an prochain? Combien de patients ont-ils attrapé la grippe cette année, comparativement à l’an dernier?)

Les résultats possibles des services de santé pour le patient

La séquence des résultats d’un problème de santé (qu’on nomme en anglais les cinq « D ») de Fletcher et al. est légèrement différente de celle présentée au premier chapitre (encadré Pour les mordus La représentation hiérarchique des résultats d’une maladie). En recherche sur les services de santé, on l’utilise souvent comme cadre pour mesurer les résultats des patients :11

Insatisfaction (Dissatisfaction) Réaction émotionnelle à la maladie et aux soins connexes, y compris la tristesse ou la colère.
Maladie (Disease) Symptômes, signes physiques et résultats anormaux aux tests en laboratoire.
Inconfort (Discomfort) Douleur, nausées, dyspnée, démangeaisons, acouphène.
Incapacité (Disability) Capacité restreinte à vaquer à ses tâches habituelles à la maison, au travail ou pendant ses loisirs
Décès (Death) La mort est un mauvais résultat si elle survient prématurément ou si elle est douloureuse

Il existe bien des façons d’évaluer un programme de santé; on en trouvera un exemple dans l’encadré Pour les mordus.

Les étapes de l’évaluation d’un programme

Stade 1 : Le modèle logique

La première étape consiste à travailler à partir du « modèle logique » du programme, lequel doit être élaboré pendant la phase de planification d’un programme complexe. Le modèle logique donne un aperçu de la manière dont une intervention (comme un programme de santé publique ou de prévention) est censée produire des résultats. Il permet de s’assurer que toutes les personnes impliquées sont conscientes de la manière dont leurs activités contribuent au but global : le modèle logique donne une vue d’ensemble. Il aide également à orienter l’évaluation du programme en définissant des objectifs intermédiaires, mesurables, afin de suivre l’évolution vers le but ultime. Il aide aussi à repérer les échecs en cours de route si le but ultime n’est pas atteint. Les éléments d’un modèle type sont la description de la situation ou du problème à aborder, les intrants ou les ressources nécessaires, les activités à entreprendre, les extrants et les résultats prévus.

Voici un modèle logique fictif pour le programme de santé dentaire décrit dans chapitre 4 (voir « Une application de la Charte d’Ottawa »).12

  • Situation : la santé buccodentaire des enfants de Glasgow en Écosse compte parmi les plus mauvaises d’Europe de l’Ouest.
  • Intrants : collaboration entre les dentistes, les médecins de premier recours et les autorités municipales.
  • Activités : établir une politique publique saine; créer des milieux favorables; développer les aptitudes personnelles; renforcer l’action communautaire et réorienter les services de santé (pour plus de détails, voir le chapitre 4 « La Charte d’Ottawa pour la promotion de la santé »).
  • Extrants : nombre de jardins d’enfants contactés; nombre d’enfants recevant des soins dentaires; améliorations selon les indicateurs de la santé dentaire.
  • Systèmes ciblés : jardins d’enfants; familles avec enfants de moins de cinq ans; centres communautaires.
  • Résultats :
    • À court terme : participation des mères aux programmes de formation en santé buccodentaire; réduction de la consommation d’aliments produisant des caries; modifications des aliments servis dans les jardins d’enfants
    • À moyen terme : amélioration du profil de santé buccodentaire
    • À long terme : réduction du pourcentage d’adolescents et d’adultes présentant des problèmes dentaires.

Stade 2 : L’évaluation

Selon l’Agence de la santé publique du Canada, l’évaluation d’un programme se divise en cinq étapes principales. On peut les illustrer à l’aide du programme de promotion de la santé buccodentaire abordé à la fin du chapitre 4. 12

Guide d’évaluation de l’ASPC Illustration à l’aide du programme de promotion de la santé buccodentaire
1. Définir le but de l’évaluation :

  • Énoncer le but de l’évaluation.
  • Élaborer un modèle logique pour le programme en indiquant comment la structure et le processus sont censés mener au résultat (voir Pour les mordus).
  • Énumérer les parties prenantes.
  • Élaborer des questions d’évaluation et vérifier la faisabilité d’une évaluation objective.
« Évaluer les résultats d’un programme de promotion de la santé buccodentaire par des analyses secondaires de jeux de données systématiques sur la carie dentaire chez les enfants de cinq ans à Glasgow entre 1997-1998 et 2003-2004. »12
Le modèle logique figure dans l’encadré ci-dessus.
Les parties prenantes sont les services de santé de la Ville de Glasgow; l’hôpital dentaire de l’Université de Glasgow; le bureau écossais du ministère de la Santé; et plusieurs groupes communautaires.
On a confirmé la possibilité d’accéder aux dossiers dentaires.
2. Sélectionner les méthodes appropriées :

  • Énoncer les attentes.
  • Formuler un plan de collecte des données.
  • Élaborer un plan logistique et en vérifier la faisabilité.
La réalisation d’un sondage par auto-évaluation ne semblait pas possible; la santé buccodentaire devait être évaluée par des experts pour consigner les résultats.
« À Glasgow, des sondages transversaux sur la carie dentaire sont réalisés périodiquement auprès d’un échantillon aléatoire d’enfants de cinq ans dans les classes d’accueil d’écoles primaires dans le cadre d’un programme national. »
L’extraction de données anonymes de sondages antérieurs a été approuvée.
3. Élaborer des outils :

  • Examiner les mesures actuelles;
  • Choisir des catégories de questions et de réponses;
  • Planifier une évaluation de la qualité de la collecte de données.
Les sondages « sont réalisés conformément aux critères standardisés de la British Association for the Study of Community Dentistry…
… et comprennent des exercices annuels de formation et de calibrage à l’échelle nationale tout de suite avant chaque sondage… »
4. Recueillir et analyser les données :

  • Collecte de données et prétest.
  • Analyse quantitative et/ou qualitative.
(Cette étude a utilisé les données secondaires d’un jeu de données existant.)
Un indice de la précarité socioéconomique de la région a été associé aux données sur la santé buccodentaire selon le code postal.
Les analyses quantitatives ont porté sur les changements dans les scores moyens de santé buccodentaire sur une période donnée, en comparant les secteurs municipaux participant à l’étude aux secteurs où le programme n’a pas été mis en œuvre.
5. Prendre des décisions :

  • Interpréter les résultats.
  • Formuler un plan d’action;
  • Produire un rapport.
« Cet article fait état des résultats positifs et reproductibles d’activités communautaires de promotion de la santé buccodentaire ciblées dans des communautés défavorisées sur le plan socioéconomique. »
« Plus l’enfant est jeune lorsque les facteurs de risque liés aux caries sont améliorés, plus l’impact sur l’incidence des caries est important pour l’enfant individuel et la prévalence des caries dans la communauté. »12

Réexaminons le diagnostic de la Dre Li

1. La Dre Li se demandait pourquoi il est important d’inscrire les diagnostics dans les rapports de sortie d’hôpital…

Les praticiens de la santé publique ont recours aux rapports de sortie et aux codes de facturation des hôpitaux pour surveiller les tendances relatives à l’incidence, à la prévalence et à la gravité clinique de diverses maladies aiguës et chroniques. Ces données hospitalières fournissent des renseignements utiles pour la planification et l’évaluation de programmes et permettent de comparer les taux de maladie à l’échelle internationale.

2. Comment les maladies sont-elles classifiées à l’échelle internationale?

Elles sont classifiées à l’aide de la CIM-10 (Classification internationale des maladies, 10e révision).

3. Quels types d’infections faut-il déclarer aux services de santé publique? Pourquoi cette démarche est-elle importante?

Le concept de maladie à déclaration obligatoire s’applique surtout aux maladies transmissibles qui présentent une menace d’épidémie, mais il peut aussi s’appliquer à certains états non transmissibles. La déclaration est importante dans la mesure où les cliniciens de première ligne sont généralement les premiers à détecter les premiers cas de ce qui pourrait devenir une épidémie de maladie infectieuse ou un problème de santé croissant tel qu’une surdose de drogues.

Questions d’auto-évaluation

1. Quelles sont les différences entre la surveillance active, passive et sentinelle? Donnez un exemple pour chacune.

La surveillance passive est l’examen de renseignements recueillis systématiquement (parfois pour d’autres raisons, comme des factures médicales) pour en dégager des tendances relatives aux maladies. Les renseignements sont ensuite transmis aux autorités de santé publique pour qu’elles puissent intervenir s’il y a lieu. Exemple : la déclaration systématique des cas de maladies à déclaration obligatoire.

La surveillance active est souvent utilisée dans des circonstances beaucoup plus urgentes et consiste à mettre en place un système de collecte de données sur une maladie précisément pour suivre son évolution. Elle est souvent initiée par les autorités de santé publique qui s’inquiètent d’une menace particulière à la santé publique. Exemple : la déclaration des cas de grippe H1N1 lorsqu’on soupçonne une éclosion.

La surveillance sentinelle combine les deux : elle comprend la mise en œuvre d’un réseau de médecins ou de bureaux de santé publique choisis soigneusement et le partage systématique de renseignements sur des maladies d’intérêt. Exemple : un réseau de médecins de premier recours choisis en fonction de leur lieu de pratique afin d’étudier et de comparer le profil des infections transmissibles sexuellement dans les régions rurales et urbaines.

2. Un examen systématique montre qu’un nouveau programme est très efficace pour réduire l’hypertension. Vous êtes la conseillère du ministre de la Santé : comment procéderiez-vous pour déterminer le besoin d’un tel programme et pour évaluer son impact sur les résultats et les coûts?

Pour transformer un programme efficace en une politique à l’échelle de la population, il faut présenter une argumentation politique justifiant la réaffectation des fonds d’un autre programme (coût de renonciation).

Voici un exemple des étapes à suivre pour formuler des arguments politiques et économiques convaincants à l’appui d’une nouvelle politique en matière d »hypertension :

Premièrement, présenter les coûts actuels de l’hypertension (p. ex., en fonction du nombre de personnes affectées, de leur morbidité et mortalité subséquentes, des coûts du traitement des affections secondaires de l’hypertension, etc.).

Deuxièmement, résumer l’approche actuelle de prise en charge de l’hypertension : le système actuel est-il efficace? Sinon, que doit-on faire pour le réparer? Quel serait l’avantage du nouveau programme?

Ensuite, évaluer la faisabilité de la mise en œuvre du programme proposé à l’échelle de la population (A-t-on les installations, le personnel, l’équipement? Peut-il être mis en œuvre partout, ou y aura-t-il des disparités d’accès?)

Finalement, prévoir les coûts de la mise en œuvre du programme et les comparer aux avantages gagnés : Une intervention précoce contre l’hypertension réduira-t-elle véritablement les coûts de traitement subséquents? Idéalement, cette analyse coûts-avantages doit être comparée aux coûts-avantages des méthodes actuelles de prise en charge de l’hypertension et de tout autre programme qui pourrait être abandonné pour dégager des fonds pour le nouveau programme.Plusieurs de ces étapes exigent la modélisation de l’impact et des coûts du programme selon des méthodes d’estimation fondées sur des sondages antérieurs (par exemple, des sondages sur la prévalence et la répartition géographique de l’hypertension).

Bibliographie

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  2. Centers for Disease Control. Interpreting an epidemic curve. In: Epidemiology in the classroom: steps in an outbreak investigation [source citée en janvier 2016]. Disponible ici http://www.cdc.gov/salmonella/saintpaul/jalapeno/epidemic_curve.html.
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